Voici un article excellent qui résume bien toute l’affaire et qui prend position pour la raison (dans ce cadre, c’est juste une question de droit) contre l’hystérie…
Extrait :
La question posée aux juges lillois n’était pas celle de la virginité au mariage ou celle de la chasteté avant la mariage, mais celle de savoir, pour annuler un mariage, si la mariée avait trompé son époux sur un élément essentiel.
Le mari l’affirme, la jeune femme l’admet.
C’est ce mensonge qui veut annulation du mariage qui rappelons-le est un contrat, certes encadré par la loi (avoir 18 ans sauf dispense du procureur, donner personnellement son consentement , être de sexes différents, etc.), mais est bien d’abord une convention entre un homme et une femme qui désirent unir leur vie.
Comme d’habitude, ceux qui hurlent n’ont pas pris la peine de lire le dossier. Car il s’agit juste d’une question de droit, pas de culture ou de coutume… Il ne s’agit pas d’approuver ou de réprouver la cause réelle de cette annulation, juste de constater que celle-ci est parfaitement valide dans le cadre de notre droit. Tous ces bien-pensants qui se réclament de l’état de droit sont-ils donc incapables de le respecter quand ce dernier se prononce en cohérence avec ses propres textes ?
Bonsoir Alain,
Tout d’abord, je te félicite pour ton nouveau site.
Concernant le sujet de ton billet, on ne peut que constater que le juge a effectivement « dit » le droit… mais il n’a pas « dit » la morale.
Cette décision juridiquement fondée peut sembler injuste et immorale à de nombreuses femmes qui se battent pour défendre leurs droits … d’où les réactions légitimes qui se sont multipliées.
Nous revendiquons des valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité qui ont construit notre pays mais nous peinons à les défendre et à les mettre en pratique. Ce jugement est loin d’être conforme à nos valeurs et il n’est jamais bon de dissocier trop longtemps loi et morale.
Salut Michael,
Content de te retrouver ici !
Bon, je crois justement que cette affaire est emblématique. Non pas du droit des femmes (ce n’est pas le débat) mais de la notion d’état de droit.
Le droit n’est pas censé dire la morale, juste rendre des décisions en conformité avec les textes. C’est à l’étage au dessus, au niveau de la rédaction des lois que ce « tri » doit se faire : entre le souhaitable et l’acceptable, entre l’inadmissible et le tout juste tolérable.
Contrairement à la majorité qui semble s’exprimer, je ne pense pas qu’il s’agit de « réactions légitimes ». Moi aussi j’ai été surpris quand j’ai appris cette annulation pour la première fois parce qu’elle était présentée par les médias comme une annulation *à cause* de la non-virginité de la mariée… Or, ce n’est pas ça qui est en cause !
Ce qui est en cause, c’est un cas de « tromperie sur les bases du contrat », point. L’annulation aurait pu être prononcé pour n raisons, toutes légitimes du moment que les parties ne s’entendent plus sur les bases de départ (et c’est bien le cas ici).
La reculade récente de Dati est inquiétante car elle signifie que, une fois de plus, on réagit à l’émotion. Ce n’est pas ça gouverner dans le cadre d’un état de droit…
Si je suis ton propos (tout est « légal » dans cette affaire), la réciproque devrait être envisageable.
Imagine qu’une jeune mariée demande l’annulation de son mariage parce que son mari est un beau parleur mais un très mauvais amant. Cette jeune femme pourra s’estimer trompée « sur la marchandise » que son mari lui aura survendu avant la nuit de noces. Elle pourrait se déclarer trompée sur « les qualités » de son époux et légitimement souhaiter annuler l’engagement contracté avec lui. Elle pourrait arguer qu’elle ne se serait jamais mariée avec lui si elle avait su que c’était un mauvais amant (non respect d’une condition essentielle pour elle au contrat de mariage)…
Qu’en penses-tu ?
On peut imaginer tout un tas de cas de figure mais ce n’est pas notre rôle : les tribunaux sont là pour cela, justement.
Pour moi, il est clair qu’il vaut mieux qu’il y ait annulation quand il y a tromperie manifeste (et quelle que soit la nature de cette tromperie) et qu’elle est avérée (là aussi, dans le cas qui nous occupe, la tromperie est avérée puisqu’admise par la principale concernée…) plutôt qu’une procédure de divorce longue et pénible.
Bref, on peut épiloguer sur ce cas et ses particularités mais je crois qu’on est en train de se tromper de débat. La vraie question est « est-on capable d’admettre les décisions de justice même quand elles contiennent quelque chose de choquant si la décision est justifiée au regard des textes en vigueur ? ». Si c’est le cas, le débat est clos sinon, il faut soit changer la loi, soit l’appronfondir pour prévoir ces cas exceptionnels (et considérés comme choquant au regard de la morale). Mais là, à mon avis, on ouvre la boite de Pandorre : tout devient contestable et tout devient choquant.
On se retrouve dans un contexte de choc des cultures, comme pour l’affaire des caricatures, où l’incompréhension mutuelle et la loi du plus fort (en fait, de celui qui fait le plus de bruit…) prévaut. C’est justement pour basculer en mode civilisé que l’archonte Dracon avait rédigé par écrit les loi régissant le comportement dans la cité…
J’ai peur de constater que les retours en arrières sont fréquents de nos jours !
Même s’il est écrit dans un code, le droit reste un construit social comme un autre qui évolue en permanence. Il est même intéressant de se pencher sur la façon dont nos sociétés produisent le droit.
En quelques décennies, l’évolution des moeurs et la demande sociale ont, par exemple, profondément fait évoluer le droit de la famille (pacs, divorce, filiation, …). De son côté, la question de l’euthanasie (et de l’aide à la fin de vie) n’est, quant à elle, toujours pas tranchée.
Toutes ces discussions sur le droit, l’éthique et la société feraient un bon sujet de philo pour le bac !