Dans le livre « Freedom Machine », j’évoquais la présence japonaise et son influence dans l’évolution des GP motos. Ici, j’ai sélectionné (arbitrairement !) une course, un grand prix chaque année entre 1972 et 1985. Parce que cette course a particulièrement comptée dans l’Histoire ou parce qu’elle a représentée un point de bascule dans la saison considérée…
Un grand merci au site http://racingmemo.free.fr/index.htm qui permet d’avoir des données précises sur quasiment toutes les courses de cette époque…
1972 : GP d’Allemagne 350, Jarno bat Ago !
29 avril 1972, sur la terrible Nordschleife (la boucle nord, tracé de 22 km) du Nurburgring, catégorie 350cc
L’évènement de ce GP d’Allemagne a lieu au troisième tour de la course des 350cc. Jarno Saarinen double Agostini, lui résiste et remporte le GP 5,4 secondes devant l’Italien. Pour Agostini, c’est la première défaite depuis le GP du Canada 500 fin 1967. De 1968 à fin 1972, hormis deux casses en 350 en 1971, il a remporté tous les GP auquels il a participé.
En s’imposant ainsi sur le circuit le plus difficile du monde (ou au moins, l’un des plus difficiles…), Jarno ne montre pas seulement sa grande classe, il montre aussi la voie : oui, Ago peut être battu à la régulière !
Saarinen ne pourra pas résister au retour d’Agostini en cours de saison mais se consolera en décrochant le titre en 250cc…
1973 : GP d’Allemagne 500, Read donne la réplique face au Flying Fin…
GP d’Allemagne 500, 13 mai 1973 à Hockenheim, duel entre Read et Saarinen.
Phil Read prend la tête dès le début de course et résiste à Saarinen jusqu’au 14ème tour où la chaîne de la Yamaha casse. Dommage, on ne saura jamais ce qu’aurait pu donné cet affontement de titans jusqu’au bout !
Agostini, sur une MV 430 4-cylindres a cassé son vilebrequin et Kanaya a serré.
C’est un exploit formidable pour Read qui arrive à reprendre le dessus sur Saarinen, pourtant ultra-dominateur depuis le début de saison. On sait ce qui se passa par la suite : Saarinen se tue à Monza (avec Renzo Pasolini) et Read coiffe la couronne en 500 à la fin de l’année, sans doute grâce à ses bons résultats en début de saison (2ème au Ricard et 1er à Hockenheim) alors qu’Ago marquait le pas mais aussi parce qu’il était prêt à tester des nouveautés afin de faire évoluer la MV. Ago prit alors la direction de Yamaha, avec le succès que l’on sait…
1974 : GP de France 500, un beau plateau !
21 avril 1974, GP de France à Charade. Le duel attendu entre les anciens coéquipiers Agostini et Read va enfin avoir lieu alors qu’Agostini a formidablement commencé sa saison en triomphant à Daytona (avec la manière) lors de sa toute première course sur une Yamaha (et la toute première sur une machine deux-temps par la même occasion).
Ce premier grand prix de la saison 1974 a un enjeu tout particulier à cause du plateau exceptionnel qui est réunit. En effet, en plus de Read sur MV et Agostini sur Yamaha, les toutes nouvelles Suzuki 500 sont également dévoilées pour la première fois. Même Kawasaki a fait le déplacement avec une 500 trois cylindres à refroidissement liquide confiée à Yvon Duhamel, le pilote vedette du constructeur vert. Du jamais vu depuis l’engagement des usines japonaises dans les années soixante…
Read part en tête, bientôt doublé et distancé par Agostini qui malheureusement cassera un piston. Phil Read n’aura plus qu’à resister à Barry Sheene qui offre son premier podium à la Suzuki RG500.
La vedette canadienne Yvon Duhamel, venu avec ses Kawasaki officielles, a cassé.
Phil Read réussira à garder son titre en dépit des belles promesses de la Yamaha d’Agostini (mais soit pas assez fiable, soit pas assez performante selon les courses). Les Suzuki étaient bien trop jeunes pour briller régulièrement et on ne revit pas les Kawasaki.
Cette saison aura été le chant du cygne pour les MV, le quatre-temps va disparaitre de la scène des grands-prix (avec un bref interlude signé Honda dans les années 80) jusqu’en 2002…
1975 : GP des Pays-Bas 500, Sheene créé la sensation !
28 juin 1975, Dutch TT à Assen. Barry Sheene asseoit définitivement sa réputation en remportant, exactement quatre mois après son terrible accident de Daytona, son premier GP 500. Après un long duel, il a passé Agostini dans le dernier virage.
Cette course restera dans les mémoires car la manière dont Sheene a joué avec YamAgo était stupéfiante de facilité. Agostini va tout de même pouvoir décrocher son dernier titre en 500 à la fin de cette saison mais cela également marquera la fin de sa période, exceptionnellement longue (tout comme Read d’ailleurs). Il faudra encore un peu de rodage pour les Suzuki mais, en 1976, elles sont enfin prêtes !
1976 : GP d’Italie 500, duel au soleil du Mugello…
16 mai 1976, GP des nations au Mugello. Giacomo Agostini a choisi de délaisser la 500 MV Agusta pour une Suzuki qui s’avère la machine de l’année. Une belle bagarre l’opposant à Sheene et Read se terminera par l’abandon de l’Italien et une nouvelle victoire de Barry Sheene.
Cette course est emblématique d’un passage de témoin entre les générations. Ago et Read représentent alors l’ancienne génération et Sheene est évidemment celle du renouveau… Les « vieux » firent mieux que résister mais l’heure du jeune Britannique avait sonné !
1977 : GP de France 500, Sheene imbattable ?
29 mai 1977, GP de France au Castellet (circuit Paul Ricard). Parti dernier, Agostini fait une fantastique remontée pour finir deuxième derrière Barry Sheene qui signe sa quatrième victoire cette saison.
Steve Baker ne peut faire mieux que troisième. Cassé par son mécanicien sur la grille de départ et réparé à la hâte, son bouchon de réservoir a lâché en course.
Pour Baker, c’était pourtant l’occasion ou jamais de stopper Sheene et de renverser la situation en sa faveur. L’américain était rapide au Ricard mais il a fallu qu’un ennui de dernière minute vienne tout gâcher. Ago était en forme pour prendre la relève mais il était dit que, décidément, personne n’était en mesure de battre Sheene, encore pour cette saison…
1978 : GP d’Angleterre 500, Roberts maitrise la pluie…
6 août 1978, GP d’Angleterre à Silverstone. Roberts a débarqué en grand prix comme un chien dans un jeu de quilles. La domination de Sheene, intraitable les deux saisons précédentes, n’est plus qu’un souvenir et le nain jaune établit un nouveau standard.
le grand prix d’Angleterre est la dernière chance de Barry de redresser une situation compromise. Mais un gros orage éclate au milieu de la course des 500cc. Les pilotes doivent s’arrêter pour changer de pneus. A ce jeu, l’équipe de Roberts est la plus forte et l’Américain reprend la tête dans le dernier tour. Du côté de Suzuki, c’est le désastre : le changement de pneus de Sheene dure une éternité !
Adieu victoire et titre… Roberts était bien le plus fort cette année-là !
Roberts gagna le titre 500 en 1978 mais pas grâce à ses pneus !
L’exploit de Kenny Roberts a été sous-estimé par le milieu en 1978 : l’américain débarquait sans connaitre les circuits, n’ayant pas la meilleure moto (c’est Cecotto qui avait la vraie 500 Yamaha d’usine cette année-là) et doté de pneus en bois (GoodYear n’ayant pas l’expérience des circuits européens avait équipé Kenny de pneus capables de résister à Daytona, bien trop durs pour les tracés du vieux continent…).
1979 : GP d’Angleterre 500, Roberts et Sheene font le show…
12 août 1979, GP d’Angleterre à Silverstone. C’est aux mains de Takazumi Katayama et Mick Grant que sont apparues les nouvelles 500 Honda NR. Il s’agit d’un 4-temps, 4-cylindres en V, 8 soupapes dans un cadre coque en alu. Malheureusement, qualifiées en dernière ligne, elles ne brilleront pas : Katayama fera quatre tours en queue de peloton alors que Grant chutera au bout de 100 mètres !
Les Honda quatre-temps ne vont jamais briller et le géant va basculer dans le clan des deux-temps dès 1982, avec Freddie Spencer au guidon !
Cet affrontement entre Roberts et Sheene resta dans les anales car ces deux-là se sont passés et repassés tout au long de cette course. Finalement, Roberts aura le dernier mot mais quel spectacle !